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Lumière sur… Les gardiens de phare
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C’est un métier qui a disparu avec l’automatisation des phares dans les années 1990 : celui de gardien de phare. Vers 1900, ils sont environ 600. Ce n’est que depuis le milieu du 19ème siècle qu’ils sont devenus des fonctionnaires. L’allumage du feu à vapeur de pétrole à la tombée du jour est le moment le plus important de leur journée. Outre la surveillance de l’horizon maritime, ils doivent s’assurer du bon fonctionnement des lampes à huile, entretenir le phare au quotidien, astiquer les surfaces de cuivre, laver les vitres, nettoyer et polir la lentille… Jour et nuit, les gardiens de phare veillent à la sécurité des pêcheurs partis en mer.
Les premiers gardiens au 19ème siècle
En 1850, Romain Eugène Baleste, gujanais de 32 ans, est employé au phare du Cap Ferret. Il tient également un restaurant sur la plage côté bassin pour améliorer l’ordinaire. Cette activité supplémentaire n’est du goût des restaurateurs des alentours. En 1854, un certain M. Maupas se plaint de ce débit de boisson qui lui fait concurrence et en demande la fermeture. Mais l’activité reste en vigueur, elle est même jugée d’une grande utilité car les rafraîchissements proposés par la femme du gardien chef du phare (hors vin, liqueurs et comestibles) sont les seules ressources que peuvent trouver les visiteurs – et même les naufragés ! – en ces terres isolées. En 1870, il décide de construire, avec l’aide de son fils, charpentier de marine, une passerelle en bois entre le phare et l’océan afin de faciliter le parcours des baigneurs dans les dunes. Longue de 650 mètres, elle est des plus simples, toute en pieux et en planches. Henri Massicault l’évoque dans son Guide illustré d’Arcachon et du littoral, publié vers 1872-1873 : » On peut visiter le phare en s’adressant au gardien. On remarque aux abords du phare une ancienne poudrière, quelques cabanes de pêcheurs, et un restaurant établi par le garde à l’intention des visiteurs. Il a été construit en 1839 par les frères Escarraguel. Une passerelle récemment établie conduit du Phare à l’Océan. » Dix ans plus tard, mis à la retraite anticipée, le gardien chef Baleste est contraint de cesser son activité lucrative d’aubergiste, le service maritime de la Gironde jugeant que cette profession parallèle se fait « au détriment de la bonne marche du phare et d’un surcroit de travail pour ses seconds qui s’en plaignaient. »
D’après l’acte de naissance de son second fils, François, né en 1869 à Gujan, Barthélémy Daney est un gardien du phare du Cap Ferret. A son décès en août 1872 à La Teste, Bernard Dehillotte-Ramondin est un gardien du phare d’Arcachon en retraite.
Dans la nuit du 21 au 22 mai 1891, les gardiens Téchoueyres et Martin père et fils meurent lors d’un terrible cyclone. Après s’être déplacés pour les besoins du service, tous trois se noient en regagnant leur poste. Le corps d’Arnaud Téchoueyres, 49 ans, est retrouvé le 19 octobre 1891 par des pêcheurs qui le reconnaissent grâce à ses boutons d’uniforme sur son gilet portant la mention « Phares et Balises ». Il laisse derrière lui sa femme Marie Bosmarin et quatre fils dont trois mineurs.
En janvier 1890, Nicolas Gabriel Morice, originaire de Rennes, prend sa retraite de gardien de phare. Sa veuve tient toujours un restaurant en 1899, à 50 mètres du phare. Le recensement de La Teste, section du Cap Ferret, de 1891 mentionne trois autres gardiens de phare :
- Elie Joseph Tascon, 42 ans, garde phare
En 1894, il est chef gardien du phare du Cap Ferret. - Aristide Lacazeau, 33 ans, garde phare
- François Camin, 35 ans, garde phare
Les gardiens de phare au 20ème siècle
Au tout début des années 1900, Jean (Firmin ou Félix) Dourthe officie au phare du Cap Ferret, vraisemblablement d’abord comme surveillant télégraphe puis comme gardien de phare. Landais d’origine, il épouse Marie Anne Larrère en 1896. Leur premier enfant, Camille Auguste, naît le 20 mars 1900 au Cap Ferret.
D’après le recensement de La Teste, section du Cap Ferret, de 1901, André Chauvet, 30 ans, est employé des phares. Vers 1904-1909, un autre André, André Siméon Soulard, 30 ans, est également garde phare. Son fils Guy Elie voit le jour le 25 mars 1904 au Cap Ferret. Appelé à un autre poste, il est remplacé par Léonard Martin, gardien de phare de 4ème classe, à partir du 1er juillet 1910. En décembre 1913, il chute dans les escaliers du phare et il est admis à l’hôpital Saint-André où les médecins constatent une partie du cuir chevelu arraché au cours de sa chute.
En 1911, le recensement de la section du Cap Ferret indique les noms de :
- François Brac, né en 1860 à Arès, comme garde phare
- Honoré Bruloug, né en 1877 à La Flotte, comme guetteur au phare.
- Jules Auguste Renaud, né en 1867, comme gardien de phare
Il est toujours présent sur le recensement du Cap Ferret de 1921. En mars 1923, il est admis à faire valoir ses droits à la retraite. Il est alors gardien de 1ère classe.
Vers 1915-1927, André Brion, né à Floirac, est gardien de phare. Sa fille Andrée naît dans le quartier du Phare en 1915. Nous retrouvons André Brion, sous le prénom de Louis, dans les recensements du Cap Ferret de 1921 et 1926. Toujours en 1926, Emile Seguin est gardien de phare de 2ème classe. Il est promu gardien de phare de 1ère classe en 1930, toujours au Cap Ferret.
La vie des gardiens de phare du Cap Ferret est mouvementée au cours de la Seconde Guerre mondiale. Antoine (André Joseph) Meaume, 38 ans, en est le gardien chef depuis le 1er août 1940. Il est épaulé par Jean Caule, gardien en 1944. Ils poursuivent leurs missions pour assurer le fonctionnement du radiophare et du feu même lorsque le phare est investi par la Kriegsmarine (marine allemande) puis par la douane qui l’utilise comme poste d’observation. Les relations entre Meaume et Ernest Pfaff, le dernier chef de poste allemand. Les deux gardiens français échappent de peu à la mort lors de la destruction du phare en août 1944. Antoine Meaume aide des résistants à traverser le Bassin d’Arcachon au sein du réseau Thermopyles des Forces Françaises Combattantes (FFC). Ses actes de résistance ont été reconnus, il figure dans la base des Titres, homologations et services pour faits de résistance du portail Mémoire des Hommes.
Cap Ferret – Le Phare et le Domaine du Phare (Editions L. Chatagneau, fonds François Bisch, Archives municipales de Lège-Cap Ferret)
Cette photographie au bromure, envoyée le 28 juin 1959, présente le nouveau phare inauguré 10 ans plus tôt, et, à droite, l’une des maisons des gardiens.
Serge Andron et Jean-Paul Eymond sont les derniers gardiens du phare de Cordouan. Il ont tous les deux assuré des remplacements au Cap Ferret, Serge Andron de 1982 à 1984 et Jean-Paul Eymond de 1982 à 1997, en mars et en octobre, lorsque le gardien titulaire, Emile Pillet, prenait ses congés.
Au départ à la retraite du dernier gardien, en 1995, c’est Eliette Gautreau, contractuelle, qui est en poste au phare du Cap Ferret. En cas de panne, c’est un technicien qui est appelé, le plus proche se trouvant au Verdon. « C’est vrai que je m’occupais de l’entretien du phare, » raconte-t-elle, « je faisais le ménage partout, les escaliers, les carrelages, j’assurais les visites et les commentaires. Mais j’ai fait la garde. Allumer le soir et éteindre le matin. Il y avait tout un protocole à respecter, je le connaissais par cœur. Nous savions à quel point ce phare était indispensable aux pêcheurs. Pendant toutes ces décennies, il n’y a eu aucune panne, aucun manquement à déplorer. J’étais au poste quoi qu’il arrive. Mon mari connaissait aussi la manœuvre, il avait une autorisation d’accès. Tous les jours, il y avait 100 batteries à recharger, pas question de tomber en panne ! » Le témoignage d’Eliette Gautreau, interviewée par Pierre Bouchilloux pour Vues du Cap en 2020, est à retrouver sur le site de Mémoire filmique de Nouvelle-Aquitaine.
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“Les souvenirs d’un homme constituent sa propre bibliothèque.”
Aldous Huxley, écrivain anglais (1894-1963)
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79 avenue de la Mairie, Lège bourg
archives@legecapferret.fr
05.57.17.07.80
Sources et références
Les Archives municipales de Lège-Cap Ferret :
- Etat-civil de La Teste-de-Bcuh, ancienne section du Cap Ferret
- Max Baumann, Le Cap Ferret, collection Le Temps Retrouvé, Editions Equinoxe, 2001
Les Archives Départementales de la Gironde :
- Recensements de la population de La Teste-de-Buc, section du Cap Ferret, de 1891, 1911, 1921, 1926
Gallica, la bibliothèque numérique de la BnF :
- Henri Massicault, Guide illustré d’Arcachon et du littoral, 1872-1873
- L’Avenir d’Arcachon, 16 juillet 1899
- Journal Officiel de la République Française
RetroNews, le site de presse ancienne de la BnF:
- L’Egalité, 25 mai 1891
- La France de Bordeaux et du Sud-Ouest, 22 octobre 1891
- La Petite Gironde, 31 janvier 1896
- La Gironde, 10 décembre 1913
Les Archives Nationales de France :
- Martine Illaire et Vincent Doom, Répertoire alphabétique des dossiers de pension du personnel des Travaux publics (Ponts et chaussées, Navigation, Mines, Chemins de fer) (XIXe siècle), Ministère des Travaux Publics, F/14/2945 à 3184, 2011.
- Martine Illaire et Vincent Doom, Répertoire méthodique et alphabétique des dossiers individuels du personnel des Phares et Balises (XIXe s.-1952), Ministère des Travaux Publics, 2011.
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