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Lumière sur… La passerelle des prés salés d’Arès-Lège
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Très prisés des visiteurs, la passerelle de la réserve naturelle des prés salés d’Arès-Lège permet de traverser le Canal des Etangs et de poursuivre sa promenade par le sentier du littoral. L’idée même de cette passerelle date du règne de Napoléon III, Empereur des Français !
Une première construction en 1866 !
La première passerelle en bois est établie en 1866 grâce à la main d’œuvre des habitants d’Arès et au bois fourni par M. Javal, propriétaire du domaine d’Arès. A l’époque, elle sert déjà de passage pour les piétons, particulièrement aux professionnels du secteur pour rejoindre plus rapidement leur lieu de travail. Un compte-rendu du 21 septembre 1871 d’un agent des Eaux et Forêts stipule qu’elle était « l’unique passage de pied sec pour communiquer directement avec les forêts pour les besoins du service ; et de sorte qu’actuellement les communications étant interceptées sur ce point il faut faire un trajet d’une heure et quart pour arriver à l’endroit où ci devant il ne fallait qu’une demi-heure. » Depuis Arès, les ouvriers se rendent à la nouvelle maison forestière du Cousteau de la Machine, en évitant un long détour. Cette passerelle est emportée par une tempête en 1871.
Elle est visiblement reconstruite puisqu’une nouvelle tempête la détruit le 27 octobre 1882. Le 5 novembre suivant, le Conseil municipal d’Arès, « demande avec insistance que l’administration supérieure accorde des secours immédiats pour le rétablissement de la dite passerelle et ouvre une souscription à cet effet. » Ce passage est primordial pour deux administrations, la Poste et les Douanes, et les autres voies de circulation sont très éloignées et impraticables. La réponse des Ponts et Chaussées du 9 janvier 1883 est malheureusement sans appel : « L’ouvrage dont il s’agit était situé entre le Bassin d’Arcachon et le pont de rencontre de la Craste Neuve et du Fossé Neuf, à 300 m environ de ce dernier point et en dehors du Domaine public maritime. Il fut établi à l’aide d’une souscription publique ouverte à ce sujet, avec des bois fournis par Mme Javal. La reconstruction de cette passerelle n’intéresse en rien le service maritime et se trouve en dehors des limites du territoire sur lequel exerce son action. »
La commune de Lège intervient…
Près de 10 ans plus tard, le Conseil Municipal d’Arès tente une nouvelle demande. Le 14 août 1892, une somme de 320 francs est prévue pour la construction d’une passerelle pour piétons sur le Canal et sur le Domaine maritime. L’Administration est certes favorable au projet mais, pour elle, la passerelle projetée se situe sur le territoire de Lège et non d’Arès ! Le Maire d’Arès adresse alors une lettre à son confrère légeot. Le 9 octobre 1892, les édiles de Lège approuvent l’édification d’une passerelle en bois de 25 mètres de longueur et un mètre de largeur, sur le canal des Etangs, au lieu appelé Canot, reconnaissant son utilité pour le passage des piétons d’une rive à l’autre. (Ce lieu-dit Le Canot avait déjà fait l’objet d’une délibération de Lège en juin 1889, précisant qu’il s’agissait d’un terrain dépendant du Domaine Maritime, la frontière entre Arès et Lège.) Un arrêté préfectoral du 22 décembre 1892 autorise la construction.
Extrait d’une carte du Bassin d’Arcachon dressé par André Rebsomen, 1939 (Archives municipales de Lège-Cap Ferret). Entre Lège et Claouey figure la Dune du Canot et, en face, la passerelle en fer dans les prés salés.
Un lieu de promenade
Utilisée pour un usage professionnel dans un premier temps, la passerelle des prés salés devient un lieu incontournable pour une charmante promenade dans le fond du Bassin d’Arcachon. Dans l’édition du 11 juillet 1926 de L’Avenir d’Arcachon, Albert Chiché, ancien député de Bordeaux, raconte d’ailleurs son excursion de Claouey à Arès. Une pinasse à moteur le conduit jusqu’au petit port de Claouey où, pour descendre, il est obligé d’emprunter « un petit canot et les épaules d’un marin ».
« De là, il s’agissait de marcher droit au nord en longeant la plage ; on nous dit que ce n’est pas possible et qu’il faut prendre la route ; nous verrons bien ; j’ai horreur des routes poussiéreuses empestées par les automobiles.
Le bassin à droite, la forêt à gauche ; c’est charmant ; côté très irrégulière, très découpée, avec des anses, des criques, des promontoires, des bouquets d’arbres s’avançant au bord de l’eau comme pour s’y mirer ; un sable fin, des sentiers, des marécages, des plaines de gourbets, des fossés, de la boue, des haies, il y a de tout ; il faut passer, on passe, non, quelquefois, sans de sérieuses difficultés.
Nous arrivons d’abord au lieu dit : Jeanne de Boy où se cachent dans la verdure quelques habitations rustiques, puis au fond d’un petit golfe, au Hourquet, hameau composé de quelques chalets ; ensuite on contourne un petit cap ; enfin on pénètre dans un autre golfe au fond duquel nous traversons la ligne d’un Decauville amène des poteaux de mines qu’un bac transporte à Arès. Nous parvenons ainsi à l’extrême pointe du bassin en un endroit portant le nom de Baste Vieille.
Maintenant nous marchons en direction de l’est, à travers une plaine de gourbets coupée de ruisseaux vaseux ; il faut prendre garde de ne pas s’y enliser. La marée étant basse, le bassin parait très éloigné ; là-bas, au bord de l’eau, des femmes cherchent des coquillages ; par un singulier effet d’optique, leur silhouette se profile gigantesque sur le ciel bleu. Des abris pour la chasse aux canards se dressent çà et là, de forme bizarre. Un potager entouré de palissades nous barre la route. Faudra-t-il revenir sur nos pas ? Heureusement que le propriétaire en train de le cultiver nous autorise à passer. Enfin nous arrivons au canal de Lège, descendant de l’étang de Lacanau ; un pont en bois l’enjambe ; nous sommes sauvés.
Au-delà, le paysage change complètement d’aspect : c’est une campagne ombragée, riante, verte, fertile, coupée de canaux et de réservoirs à poissons. Nous suivons une digue entre deux cours d’eau et bientôt nous arrivons au superbe parc de Madame Wallerstein… »
La passerelle à travers le temps
Le site de photographies aériennes Remonter le Temps nous permet de suivre l’histoire de la passerelle. En 1934, elle enjambe toujours le Canal des Etangs. En mai 1957, elle fait toujours son office mais elle disparait l’année suivante.
Vue sur le fond de Lège et la passerelle au-dessus du Canal des Etangs (extrait d’une photographie aérienne, 16 juillet 1934, site Remonter le Temps)
Vue sur le fond de Lège et la passerelle au-dessus du Canal des Etangs (extrait d’une photographie aérienne, 5 mai 1957, site Remonter le Temps)
Vue sur le fond de Lège. La passerelle a disparu (extrait d’une photographie aérienne, 25 juillet 1958, site Remonter le Temps)
C’est encore une fois Remonter le Temps qui nous permet de déterminer sa date de réapparition. En juillet 1982, le Canal est toujours vide. En revanche, revoilà une nouvelle passerelle en juin 1984. Construite par un Arésien ferronnier, Michel Prévot, cette passerelle en métal de style Eiffel est à son tour emportée par une tempête plus de 25 ans plus tard. Le 24 janvier 2009, la tempête Klaus ravage le Sud-Ouest.
La passerelle au-dessus du Canal des Etangs (Sud-Ouest, 28 septembre 1983, fonds presse, Archives municipales de Lège-Cap Ferret)
Une passerelle provisoire est reconstruite en catastrophe avec du bois non traité. Elle se détériore au point de ne plus pouvoir être empruntée en 2018. Un arrêté municipal en interdit d’ailleurs l’accès à partir du 1er décembre.
Une passerelle métallique flambant neuve surplombe le canal depuis fin 2022. Celle-ci est inaugurée le 14 novembre 2022. Elle permet à nouveau aux promeneurs de finir la boucle du sentier du littoral du bassin d’Arcachon.
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“Les souvenirs d’un homme constituent sa propre bibliothèque.”
Aldous Huxley, écrivain anglais (1894-1963)
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79 avenue de la Mairie, Lège bourg
archives@legecapferret.fr
05.57.17.07.80
Sources et références
Les Archives municipales de Lège-Cap Ferret :
- Délibérations du Conseil Municipal de Lège-Cap Ferret
- Fonds presse (articles Sud-Ouest)
- Côte et Terre Impressions n°24, automne-hiver 2014
Gallica, la bibliothèque numérique de la BnF :
- L’Avenir d’Arcachon, 11 juillet 1926
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