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Lumière sur… Le(s) feu(x) du phare du Cap Ferret
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C’est une lueur salvatrice dans la nuit noire pour tous les bateaux de la côte. Depuis 1840, le phare du Cap Ferret éclaire notre littoral girondin. Son histoire fut mouvementée – sa destruction par les troupes d’Occupation en 1944 est bien évidemment l’épisode le plus connu. Mais le choix de ses feux, ses éclats rouges et/ou blancs, fut également l’objet de vives tensions à la fin des années 1920.
1840 : Le 1er feu fixe
Nouvellement construit, le phare du Cap Ferret est allumé pour la première fois le 1er novembre 1840. Le feu fixe, de couleur blanche, a une puissance de 576 becs carcel. Sa portée lumineuse est cotée à 18 milles mais en réalité elle n’est seulement que de 9 milles 5, 95 fois sur 100. L’éclairage est assuré par une lampe à double courant d’air alimenté à l’huile de colza. En 1874, le pétrole remplace l’huile de colza. Un grillage en fil de cuivre entoure la lanterne. Il a été rendu nécessaire en raison des accidents que causaient aux vitres les nombreux oiseaux de mer qui venaient heurter la lanterne, attirés par la lumière du phare.
1904 : Un nouveau feu mixte
Vers octobre 1904, le phare du Cap Ferret est doté d’un nouveau feu. L’éclat est alternativement blanc et rouge toutes les 20 secondes Ce feu a une puissance de 6.000 becs carcel pour les éclats blancs, et de 2000 becs carcel pour les éclats rouges. Son rythme est le suivant : éclat blanc, 5 secondes, éclipse, 15 secondes ; éclat rouge, 5 secondes, éclipse, 15 secondes ; total, 40 secondes. Sa portée lumineuse est de 22 milles pour les éclats blancs et de 20 milles pour les éclats rouges. Le feu est alimenté avec un brûleur à incandescence par la vapeur de pétrole comprimée.
Le phare du Cap Ferret doté de nouveaux feux tournants rouge et blanc (fonds François Bisch, Archives municipales de Lège-Cap Ferret)
1928 : LE FEU DE LA DISCORDE
Le 30 septembre 1928, un nouveau feu est mis en service au phare du Cap Ferret. Le feu blanc disparait au profit du seul éclat rouge. Cette décision de la Commission des phares fait suite au vœu de la Société des Nations, l’ancêtre de l’O.N.U. Les feux mixtes, difficiles à identifier, sont supprimés car les différentes couleurs ne portent pas à une distance égale.
Cependant, ce nouveau feu unique suscite la colère des marins arcachonnais. Il ne porte plus qu’à 7 par temps clair. Lorsque le temps n’est pas clair, l’éclat rouge du phare n’est aperçu par les bateaux que « lorsqu’ils sont déjà dans les brisants ». Ils protestent auprès de l’Administration des Ponts et Chaussées, sans grand succès. Ils adressent ensuite une pétition, qui rassemble près de 300 signatures, au Ministre des Travaux Publics. Cette pétition est accompagnée de rapports de mer relatifs aux accidents survenus à cause de ce changement de signalisation. Parmi ses sinistres, citons l’échouage du chalutier « Henri-Cameleyre ». Le 1er avril 1930, dans la nuit, ce chalutier de 245 tonneaux s’échoue entre le banc de Pinaud et le Cap-Ferret. Le renflouement n’est envisagé seulement qu’au 12 avril avec la grande marée (il sera effectivement renfloué deux mois et demi plus tard). L’équipage n’est pas en danger, mais le canot de la station de sauvetage du Cap Ferret s’est tout de même rendu sur les lieux. La magnifique pêche a dû être jetée à la mer. Le capitaine a vu trop tard « l’insuffisant éclat rouge du phare » à cause de la brume.
L’Henri-Cameleyre, échoué dans les passes d’Arcachon (fonds Fabien Lasserre, Archives municipales de Lège-Cap Ferret)
D’ailleurs, le journal Le Matin, dans son édition du 1er mai 1930, titre ainsi un de ses articles : « Il faut rendre son éclat blanc au phare du Cap Ferret », accompagné de la photographie du « Henri-Cameleyre » échoué sur un banc de sable.
En réponse aux protestations des marins, l’Administration des Ponts et Chaussées assure qu’il n’est pas possible de remettre l’ancien feu rouge. D’une part, il s’agit d’un vœu de la Société des Nations, et d’autre part les deux autres phares du littoral proche, Contis et Hourtin, sont déjà blancs. Toutefois, ils consentent à remplacer l’éclairage à vapeur de pétrole par l’éclairage électrique, à transformer une ou plusieurs bouées en bouées lumineuses, et à installer des surfaces réfléchissantes sur les principales bouées. Les marins préfèrent conserver les deux éclats mais, au cas où l’un des deux devrait être supprimé, ce serait plutôt le rouge et non le blanc. Le feu blanc a une portée supérieure au feu rouge. La logique voudrait que seul le phare du Cap Ferret soit blanc, car il marque l’entrée d’Arcachon, alors que les deux autres ne servent qu’à baliser la côte.
Le Conseil Général de la Gironde s’empare de la question. Lors de la séance du 4 septembre 1929, il émet le vœu que les services maritimes transforment le feu rouge fixe du phare du Cap Ferret en feu tournant blanc et rouge, tel qu’il était avant la modification. La proposition est soutenue par M. Dignac (l’ancien feu était « d’une excellente visibilité », maintenant « à peu près invisible par temps bouché »).
Les marins arcachonnais obtiennent gain de cause. En mars 1931, un feu auxiliaire est allumé dans la tour du phare au-dessus du feu principal. Ce nouveau feu est blanc et varié par des occultations groupées par 3 toutes les 18 secondes. En juin 1931, ce feu blanc est mis provisoirement en feu fixe.
1947 : deux feux pour un nouveau phare
Le nouveau phare du Cap Ferret, reconstruit en 1947 après sa destruction, conserve les deux feux : un feu à éclats rouges, toutes les cinq secondes, et un feu blanc auxiliaire. Sa portée lumineuse est de 27 milles ou 50 kilomètres. La lanterne est alimentée par une lampe halogène de 1000 Watts sous 220 volts. Son fonctionnement est automatisé depuis 1995.
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Aldous Huxley, écrivain anglais (1894-1963)
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SOURCES ET RÉFÉRENCES
Archives Municipales de Lège-Cap Ferret :
- Fonds Fabien Lasserre
- Fonds François Bisch
Retrouvez la collection de cartes postales de Mr Bisch sur son site.
RetroNews, le site de presse ancienne de la BnF :
- Le Petit Provençal, 10 décembre 1929
- La France de Bordeaux et du Sud-Ouest, 10 décembre 1929
- La Petite Gironde, 5 avril 1930
- Le Matin, 1 mai 1930
- L’Ouest-Éclair, 10 mars 1931
Gallica, la bibliothèque numérique de la BnF :
- L’Avenir d’Arcachon, 9 octobre 1904
- Rapports et délibérations du conseil général de la Gironde, séance du 4 septembre 1929
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